Serge Brison fait partie des photographes qui finissent leurs images avant de déclencher l’obturateur, voire même, parfois, avant de sortir leur matériel. Ceux-là sont des opérateurs économes de leurs mouvements, aux antipodes des paparazzi surexcités, de fins observateurs capables de détecter in situ ce qui rendra sens.

Ces découpeurs de monde à vif affrontent le réel de face, presqu’en corps à corps ; ils le jaugent d’un coup d’œil se positionnent en quelques pas, avant de décider avec une sûreté surprenante où ils vont passer le scalpel de l’objectif. Le prélèvement se fait en une ou deux prises, rarement plus, puisque chez eux, la pensée précède le geste.

Il faut avoir vu Serge Brison à l’œuvre pour apprécier la concentration décontractée avec laquelle il échafaude des vues parfois complexes, avec laquelle il construit des images particulièrement élaborées. Pour apprécier aussi - avec une pointe de jalousie, lorsqu’on exerce le même métier- le résultat impeccable au sortir d’un traitement de laboratoire des plus élémentaires.

Cette facilité apparente et les moyens simples - une chambre technique et du film- cachent en fait une grande maîtrise. Celle d’un œil rompu aux allers et retours incessants entre la matière et la structure, rompu surtout à l’évaluation de l’essence des choses. Celle d’un esprit réconciliant avec virtuosité l’être et l’apparence.

En cela, plus que le photographe d’architecture prestigieuse qu’on croit, Serge Brison se révèle en chacune de ses vues, un architecte accompli du regard.

Jean-Marc Bodson, Bruxelles, juillet 2003